Réunion Zéro Déchet: compte-rendu
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Mardi 10 décembre 2019, nous avons eu le plaisir d’accueillir à Montrouge plusieurs pionniers d’une démarche appelée à grandir dans nos vies, celle du « zéro déchet« . Confrontés à la marée montante des détritus plastiques et autres, dont nous Français produisons chacun environ 100 kilos par trimestre en moyenne, les écosystèmes dont nous dépendons ne survivront que grâce à la remise en question de nos modes de vie polluants.

En quoi consiste la démarche Zéro Déchet et comment tendre vers cet idéal? Se sont exprimés sur le sujet:

Merci à eux ainsi qu’au public pour la qualité des interventions.

 

Les constats et le principe des 5R
Chaque année, l’humanité rejette dans l’environnement son poids en déchets. Zero Waste nous rappelle à quel point ceux-ci ont un effet nocif sur l’écosystème. C’est le cas, en particulier, du plastique, qui se répand dans les eaux, y compris sous forme microscopique. Nous l’absorbons notamment dans l’eau potable, la bière et le sel de mer. Au total, nous en avalons l’équivalent d’une carte de crédit par semaine.

Émissions de gaz à effets de serre, empoisonnement des animaux et des hommes… N’en jetez plus, nous voulons agir! Mais comment faire? Par ordre de priorité, nous pouvons refuser, réduire, réutiliser, rendre à la terre et recycler. Refuser une consommation qui ne vaut pas vraiment le coût, réduire pour éviter le gaspillage, réutiliser grâce au troc, aux ateliers de réparation (repair shops), aux recycleries, etc., rendre à la terre ce que la nature peut régénérer (compostage) et, en dernier lieu tant le processus est imparfait, recycler.

Le recyclage dépend du tri, activité d’autant plus difficile à maîtriser que les consignes de tri exactes varient en fonction du lieu. Astuce: l’application mobile Guide du tri indique, pour chaque emballage, les consignes locales.

Au bout du chemin, « de 20 à 30% d’économies » sur les courses, notamment alimentaires mais pas seulement (le savon solide, rapporté à son utilité hygiénique, coûte beaucoup moins cher que le savon liquide).

 

Anne Le Guenniou confirme ce chiffre et note que, pour beaucoup de personnes, l’argument du coût peut les inciter à passer à l’acte, même si elle avait initialement mis cette question de côté. C’est en 2014 qu’elle décide de ne plus générer de déchets. Un déconditionnement qui prend du temps: « Je pouvais changer deux ou trois habitudes par mois. » Au sein de sa famille, plusieurs modes de consommation se mettent alors à cohabiter: « Chacun choisit son mode. » A l’époque, sa démarche peine à convaincre: « J’avais le mur de l’incompréhension à franchir. » Ayant témoigné de son parcours, qu’elle n’impose à personne, elle évoque la satisfaction que rapporte cette démarche.

 

Tout cela est bel et beau mais, d’après une étude de Carbone 4, les leviers de réduction de l’empreinte carbone moyenne relèvent à 75% d’efforts collectifs (entreprises, services publics et, bien sûr, municipalités).

 

Le hamburger industriel pollue à échelle industrielle
Marine, à l’origine de la pétition McDo Zéro Déchet, que nous vous invitons à signer, décrit justement sa prise de conscience de l’impact d’une entreprise dont le modèle économique de tout-à-jeter et les mauvaises pratiques (ou absences de pratique) en matière de tri des déchets nuisent gravement à la planète: 1 kilo de déchets par seconde.

Lorsqu’elle lance à Poitiers la pétition début 2019, Marine a pour but « d’exiger des fast-foods d’avoir des solutions zéro déchet« . Et ce, d’autant plus que les déchets n’y sont pas forcément triés convenablement. D’une part à cause des déchets eux-mêmes, comme ces gobelets où « séparer le carton et le plastique est à peu près impossible« . Et aussi en raison des déficiences du tri. Une « opération McPoubelle » de collecte de photographies de poubelles de restaurants permet de constater que moins d’un tiers des établissements de la chaîne semblent pratiquer le tri, obligatoire à partir de la fin 2019.

Le géant de la restauration rapide réagit en accordant un entretien téléphonique d’une vingtaine de minutes. Une chargée de communication explique à Marine que McDonalds fait, en somme, beaucoup pour l’écologie, entérinant la fin des pailles en plastique (légalement vouées à disparaître) et faisant circuler des camions fonctionnant avec de l’huile de friture. Cela ne suffit plus pour tous ceux qui sont informés de la gravité des dégradations environnementales en cours: « On a envie de plus d’éthique. Ils n’y peuvent rien et je pense qu’ils se rendent compte que leur système est fatigué. » Car c’est un changement très profond du modèle d’affaire de l’entreprise que les enjeux de l’époque imposent. Une autre pétition, venue du Royaume-Uni, refuse la présence dans les menus enfants de ces jouets en plastique prêts-à-jeter.

 

Diminuer les déchets à grande échelle dans les mois à venir
Le gouvernement repousse à la génération suivante (2040) une action décisive contre le plastique mortifère. Découvrez sur le site de Zero Waste France ce que les militants du zéro déchet pensent de la loi anti-gaspillage en cours d’examen. Cependant, des leviers d’action collectifs existent grâce aux prochaines échéances électorales.

Les mesures proposées par la campagne municipale EELV de David Belliard pour la mairie de Paris montrent le chemin que nous voulons voir Montrouge prendre. La gestion des déchets est une compétence déléguée à l’intercommunalité (Vallée Sud Grand Paris), mais elle se planifie vraiment à l’échelle de la métropole. Si nous ne voulons pas que nos déchets aillent nourrir les fumées de l’incinérateur d’Ivry, pourquoi donc ne pas mettre en place:

  • la tarification incitative pour la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (à l’image de ce que font déjà 200 communes dans le pays), déterminée en fonction de la quantité de déchets non triés rejetés chaque année, et accompagnée d’une bonne communication pour créer une culture du déchet (avec une année blanche pour informer du prix qui serait payé avec le nouveau système);
  • un système municipal de consigne destiné à supprimer à terme les emballages jetables des ventes de restauration à emporter;
  • une politique d’achat et de commande publique intégrant l’objectif de réduction des déchets (ne pas subventionner ni autoriser d’événements avec des objets jetables);
  • et: un plan de compostage de proximité, la généralisation du tri à la source dans les espaces et bâtiments publics, la distribution de couches lavables aux nouveaux parents, etc.

 

Diminuer sa production personnelle de déchets de 75% ne prend que deux ou trois mois de bonnes habitudes. Une note d’espoir, s’il en fallait une, c’est le poids de trois mois de déchets d’Anne, exhibés dans un cylindre transparent: 100 grammes.